Chevauchée aérienne mémorable pour aller visiter le Balaïtous par l’arête de Costerillou : son nom si évocateur et ses sommets difficiles d’accès. Le « Bala » est décidément l’un des sommets les plus complexes et fascinants des Pyrénées.

Date : 2023/07/08
Distance totale Distance et dénivelé indicatifs. Privilégier ces valeurs plutôt que celles de tracedetrail. : 18 km
Dénivelé positif : 2100 m
Temps de montée Pauses classiques incluses (photo, discussion, collation, manips à ski...) au contraire des longues interruptions (sommet, refuge, sieste...) : 3h d’approche + 4h45 d’arête.
Temps de descente : 2h45
Conditions et commentaires : beau et venté.
Difficultés : arête de Costérillou côté AD, souvent vertigineuse.
Accès : centrale de Migouélou (parking de la Maison du Parc)
Itinéraire Identification nécessaire pour changer de fond de carte. : parcours et profilGPX

Premier jour d’un week-end où nous avons prévu de dormir au refuge de Larribet. Quelques années après ma (seule) visite au Balaïtous, je trépigne de retrouver ce sommet. Nous avions terminé bien fatigués après une nuit catastrophique dans une tente posée en vitesse sur le parking à 23h30. Avec l’oubli du matelas et d’un oreiller, le sommeil avait été plus dévastateur que récupérateur. Pour cette journée, nous avons prévu de parcourir la célèbre arête de Costerillou qui s’étire de la brèche Demeure-Soulé jusqu’au sommet du Balaïtous. Nous trouvons quelques infos à la lecture des récits espagnols, dont la plupart attaque au niveau de l’aiguille d’Ussel grâce à un couloir facile, à quelques exceptions près, comme ce récit qui nous a servi de topo. Du côté des français, elle semble être davantage parcourue dans l’autre sens notamment lors de la traversée des trois arêtes où la brèche Demeure-Soulé est généralement le lieu de bivouac.

Pour rejoindre la brèche, nous remontons la longue vallée de la Peyre-Saint-Martin jusqu’aux abords de la toue de Casterie. Jolie lever de soleil vers les Gabizos dans le grand calme de ce petit matin, rythmé par les cloches des vaches paissant (merci Google pour le gérondif) sous le refuge Ledormeur. Après avoir traversé le torrent, quelques cairns sont présents mais l’itinéraire demeure évident : nous passons sous le pic des Cristayets pour rallier la brèche de las Néous (2595 m), abrupte côté N. Est-elle franchissable ? Si je connaissais déjà le parcours jusqu’à présent, c’est le début de la découverte ! Nous sommes heureux de constater que seul un mince névé est présent pour monter à la brèche Demeure-Soulé. Selon les conditions de neige, l’accès peut être un peu exposé car les pentes supérieures déversent sur la barre de la brèche de las Néous. Sans surprise au regard des nuages qui circulaient à grande vitesse vus depuis le bas, c’est une véritable soufflerie côté espagnol. Même si ce vent va nécessiter encore plus d’attention, ce n’est la tempête qu’on aurait pu craindre.

Pic Central depuis l'aiguille d'Ussel

Pic Central depuis l’aiguille d’Ussel

La montée à la pointe Durand demande de poser les mains en restant majoritairement côté français. C’est ici que nous nous équipons et prenons une bonne pause avant d’attaquer les choses sérieuses. Comme d’habitude, et encore plus sur les itinéraires grimpants, je ne vais pas décrire chaque portion dans le moindre détail, mais me contenter d’impressions générales. La descente à la brèche suivante demande quelques pas de II côté français avant de remonter à la pointe de la Défaite par des vires herbeuses faciles. Désormais, la suite du parcours est bien visible : il va falloir se frayer un chemin entre tous ses gendarmes. Jusqu’au pic Central, le terrain est plus complexe et le rocher parfois moins bon. Jallonnée par des gendarmes effilés (certains équipés d’un anneau de corde), cette portion est ponctuée de deux murs raides en III/III+. Peu avant le sommet, nous passons versant français pour longer une portion très découpée. Après un pas délicat mais peu exposé, une vire nous permet de rejoindre une cheminée raide jusqu’à une brèche. Après un nouveau passage raide, le terrain devient brusquement très facile jusqu’au pic Central constitué d’immenses blocs de granit. Nous apercevons des silhouettes en haut du Balaïtous, elles sont encore bien petites.

Après quelques mètres de marche, un rappel (vieux spit et 3 pitons) d’une quinzaine de mètres nous dépose à la brèche suivante où le vent frais s’y engouffrant nous chasse rapidement vers l’aiguille d’Ussel. C’est à cette brèche précédente que beaucoup de cordées espagnoles démarrent l’arête de Costerillou. En regardant le chemin parcouru, c’est à se demander par où nous sommes passés tant le terrain semble peu lisible. De plus, les falaises du pic Central sont si abruptes et sévères versant ibérique, que nous peinons à croire que la partie sommitale versant français s’est faite en marchant tranquillement. Depuis l’aiguille d’Ussel, la tour de Costerillou se confond tellement avec les ressauts suivants que nous avons des difficultés à la distinguer. Tout comme la montée, la descente du sommet est facile. Nous passons sous un gros bloc formant une fenêtre qui ne se dévoile qu’au dernier moment. Puis, le fil redevient découpé avec plusieurs gendarmes effilés successifs. Ensuite, nous passons versant français pour une traversée avec les fameuses prises inversées citées dans les topos, traversée finalement facile avec des prises excellentes. Nous arrivons alors à un relai sur spit pour faire un court rappel de 7 mètres, semblant facultatif, même si c’est toujours plus facile de dire ça vu d’en bas.

Arête de Costerillou - © P.Rochas

Arête de Costerillou – © P.Rochas

Alors que nous avions progressé en corde tendue jusqu’alors, nous faisons deux courtes longueurs : la première en III+ avec relai sur bloc juste à côté de l’arc boutant, énorme rocher posé en équilibre. Puis Pablo part sur la deuxième longueur avec 4 mètres en IV au début et prendra la tête jusqu’à la fin de l’arête. La tour de Costerillou a longtemps raisonné comme un bastion inaccessible et j’ai du mal à réaliser que nous sommes dessus. Le rappel de vingt mètres pour en descendre est plutôt confortable, équipé d’un spit et d’une cordelette sur bloc. Le vent souffle toujours puisque le vent fait voler les deux brins lorsque nous les lançons. Petite astuce dans ce cas : mettre les brins dans le sac. Après un mur en III/III+ et quelques acrobaties sur des gros blocs, nous débouchons sur le plateau sommital du Balaïtous après avoir parcouru l’arête de Costerillou, quelle joie ! Nous prenons une longue pause allongés dans l’aire de bivouac juste à côté de la borne géodésique à discuter et à observer le panorama gigantesque. Deux français arrivent au sommet après avoir rallier Pau au caillou de Socques à vélo, ils vont bien dormir ! Nous partageons la même impression sur la traversée des 3 arêtes qui doit être un sacré chantier que ce soit à la journée ou sur deux jours avec le poids du matérial du bivouac. Dans le cas où cette course est réalisée tard dans la saison, se pose également le problème de l’eau. Enfin, cela signifie également qu’il faut parcourir l’arête de Costerillou dans l’autre sens avec de nombreuses désescalades et une lecture peut-être plus compliquée.

Nous quittons le sommet suffisamment tôt avant le groupe d’espagnols pour espérer ne pas recevoir des pierres sur le casque. Pour rejoindre la Grande Diagonale, le terrain est gorgée d’eau, le rendant plus croulant et nécessitant un peu d’attention. Puis, c’est du classique jusqu’à l’abri Michaud puis la brèche des Ciseaux depuis laquelle le vallon minéral semble désespérant. Nous descendons tranquillement en passant par les lacs de Micoulaou puis les lacs de Batcrabère. L’arête NO est un objectif qui devient envisageable mais il faut avouer qu’elle a de l’allure, pour ne pas dire intimidante. Très bon repas au refuge de Larribet avec un choeur d’hommes et huit chants pour terminer la soirée. J’espère que la personne ayant pris malencontreusement (ou pas) ma flasque en aura fait bon usage…